Revue de l’utilisation des agonistes ß2 inhalés et des antagonistes des récepteurs des leucotriènes employés dans le traitement de l'asthme
2003-12-01 | Médicaments: Usage optimal
La présente étude porte sur l’utilisation des agonistes ß2 inhalés et des antagonistes des récepteurs des leucotriènes employés dans le traitement de l’asthme. Il s’agit d’une étude rétrospective réalisée à partir des données anonymisées portant sur les médicaments dispensés aux prestataires de la sécurité du revenu et aux adhérents inscrits au régime d’assurance médicaments administré par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Ces données ont été extraites de la banque de données de la RAMQ. Dans le cadre de cette étude, 50 875 personnes âgées entre 5 et 45 ans ont été réparties en cinq groupes selon la classe des médicaments reçus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2001. Les trois premiers groupes comptaient 39 974 sujets qui ont reçu des agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action en association (22 392 sujets) ou non (17 582 sujets) avec des corticostéroïdes inhalés. Les 7 293 sujets qui ont reçu des agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action ont été inclus dans le quatrième groupe, et les 3 608 sujets qui ont reçu des antagonistes des récepteurs des leucotriènes ont été inclus dans le cinquième groupe.
L’objectif principal de cette RUM consistait à évaluer la conformité des premières ordonnances d’agonistes ß2 inhalés et d’antagonistes des récepteurs des leucotriènes aux quatre critères explicites élaborés par un groupe d’experts et inspirés de la mise à jour en 2001 des recommandations de la Conférence canadienne de consensus sur l’asthme de 1999. Comme les trois premiers critères de cette RUM étaient communs avec ceux de la RUM publiée en 1999, nous avons comparé les résultats de conformité à ces trois critères, ce qui constitue la RUM de suivi. Cette étude avait aussi comme objectif secondaire de documenter l’utilisation de l’AdvairMC DiskusMC, première association commercialisée d’un agoniste ß2 inhalé à longue durée d’action et d’un corticostéroïde inhalé, dans le continuum du traitement de l’asthme. De plus, nous avons évalué l’utilisation des agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action et des corticostéroïdes inhalés pour toute la période de l’étude.
Les résultats de cette étude ont indiqué une augmentation significative du taux de conformité au critère no 1 par rapport au taux qui avait été observé dans l’étude fondée sur les données de 1997-1998. Globalement, parmi les 39 974 sujets des groupes 1, 2 et 3, la fréquence d’utilisation quotidienne des agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action n’a pas excédé deux inhalations chez 74,7 % des sujets (critère no 1) alors que ce taux était de 70,9 % en 1997-1998. L’amélioration de l’utilisation des agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action a été plus marquée encore lorsque nous n’avons tenu compte que des sujets qui avaient reçu au moins deux ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action au cours de la période de l’étude : le taux de conformité au critère no 1 atteignait alors 40,5 % pour l’ensemble des trois groupes en 2001 alors qu’il n’était que de 8,4 % en 1997-1998.
Quant au taux de conformité au critère no 2, nous avons observé peu de changements en 2001 par rapport à 1997-1998. Parmi les 7 293 sujets du groupe 4, la durée d’utilisation d’un format unitaire d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action se situait entre 25 et 35 jours chez 13,5 % des sujets de ce groupe (critère no 2), ce qui représentait une diminution significative par rapport au taux de 18,6 % observé dans la RUM de 1999. Toutefois, lorsque nous n’avons tenu compte que des sujets qui ont reçu au moins deux ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action au cours de la période de l’étude, nous n’avons observé aucune différence significative entre les taux de 2001 (27,2 %) et de 1997-1998 (30,0 %). Par ailleurs, le taux de conformité au critère no 2, parmi les 1 021 sujets du groupe 5 qui possédaient aussi des ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action, était de 28,7 % pour l’ensemble des sujets de ce sous-groupe et de 35,5 % lorsque nous n’avons tenu compte que des sujets qui avaient reçu au moins deux ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action au cours de la période de l’étude.
Nous avons noté une amélioration significative du taux de conformité au critère no 3 en 2001 par rapport au taux observé en 1997-1998. Parmi les 7 293 sujets du groupe 4, 74,6 % des sujets ont reçu des corticostéroïdes pendant chacun des 30 jours qui ont suivi leur première ordonnance d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action au cours de la période de l’étude; cette valeur comprenait toutefois les 4 452 sujets dont les ordonnances évaluées étaient de l’AdvairMC DiskusMC (ordonnances automatiquement conformes au critère no 3). Lorsque nous n’avons tenu compte que des 2 841 sujets dont les ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action évaluées étaient de dénominations communes autres que l’AdvairMC DiskusMC, le taux de conformité au critère no 3 était de 34,7 %, soit une augmentation significative par rapport au taux de 15,4 % observé en 1997-1998 alors que l’AdvairMC DiskusMC n’était pas encore commercialisé. Par ailleurs, parmi les 1 021 sujets du groupe 5 qui possédaient aussi des ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action, le taux de conformité au critère no 3 était de 68,9 %, ordonnances d’AdvairMC DiskusMC comprises, et de 42,0 % lorsque nous n’avons tenu compte que des 483 sujets dont les ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action évaluées étaient de dénominations communes autres que l’AdvairMC DiskusMC. Toutefois, lorsque nous avons observé les 7 293 sujets qui ont reçu des ordonnances d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action pendant toute la période de l’étude, nous avons constaté que 36,1 % d’entre eux ne possédaient aucune ordonnance de corticostéroïdes inhalés, ce qui a dénoté une sous-utilisation des corticostéroïdes inhalés.
Le critère no 4 était propre à la présente RUM. Nous avons observé que, parmi les 3 608 sujets du groupe 5, la durée d’utilisation d’une ordonnance mensuelle d’antagonistes des récepteurs des leucotriènes se situait entre 25 et 35 jours, chez 35,0 % des sujets (critère no 4A). Lorsque nous n’avons tenu compte que des sujets qui ont reçu au moins deux ordonnances d’antagonistes des récepteurs des leucotriènes au cours de la période de l’étude, le taux de conformité au critère no 4A atteignait 50,6 %. Le taux de conformité au critère no 4B nous a permis de constater que 74,6 % des 3 608 sujets du groupe 5 avaient reçu au moins une ordonnance d’un agoniste ß2 inhalé à courte durée d’action dans les sept mois qui ont précédé la première ordonnance d’antagonistes des récepteurs des leucotriènes au cours de la période de l’étude. Le taux de conformité au critère no 4 dans son ensemble (critères no 4A et no 4B) n’a atteint que 25,4 %.
Les données de cette étude ont montré une forte utilisation de l’AdvairMC DiskusMC comme médicament de première intention dans le traitement de l’asthme. En effet, parmi les 4 952 sujets dont l’AdvairMC DiskusMC était la première ordonnance d’un agoniste ß2 inhalé à longue durée d’action relevée au cours de la période de l’étude, 3 942 d’entre eux (79,6 %) n’ont reçu aucune ordonnance d’agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action (y compris l’AdvairMC DiskusMC) au cours de la période d’au moins sept mois précédant leur première ordonnance d’AdvairMC DiskusMC. Ces ordonnances ont donc été considérées comme un premier traitement avec l’AdvairMC DiskusMC et, entre le 1er juin 2000 et la date de service de cette ordonnance, on a relevé, parmi ces 3 942 sujets, aucune ordonnance d’un agoniste ß2 inhalé à courte durée d’action pour 1 803 sujets (45,7 %), aucune ordonnance de corticostéroïdes inhalés pour 2 668 sujets (67,7 %) et aucune ordonnance d’agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action ni de corticostéroïdes inhalés pour 1 669 (42,3 %) sujets. Ces résultats ne satisfont pas aux critères reconnus pour le traitement des personnes atteintes d’asthme ni aux indications d’un médicament combinant un agoniste ß2 inhalé à longue durée d’action et un corticostéroïde inhalé.
La revue de l’utilisation des agonistes ß2 inhalés et des antagonistes de récepteurs de leucotriènes a permis de dresser quatre constats :
- les agonistes ß2 inhalés à courte durée d’action sont encore surutilisés, malgré une amélioration significative des taux de conformité au critère no 1;
- les corticostéroïdes inhalés sont encore sous-utilisés;
- les agonistes ß2 inhalés à longue durée d’action ne sont pas utilisés de façon optimale;
- finalement, les antagonistes des récepteurs de leucotriènes ne sont pas utilisés de façon optimale.
Les résultats de cette étude ont montré que l’utilisation des médicaments étudiés n’était pas optimale, malgré une amélioration notée à certains égards. Une utilisation plus systématique des critères de maîtrise de l’asthme de la part des médecins et une meilleure compréhension de ces critères de la part des patients pourraient contribuer à une utilisation plus appropriée des médicaments dans le traitement de l’asthme.