Extrait d'avis au ministre
Carvykti (myélome multiple)
Nom du fabricant : Janss. Inc
Forme : Susp. Perf. I.V.
Teneur : ≤ 100 000 000 cellules CAR-T
Indication : Traitement de 2e à 4e intention du myélome multiple récidivant et réfractaire
Recommandation de l'INESSS
Refus d'inscription – Ensemble des aspects
Décision du Ministre
Surseoir à la décision (2024-12-12)
Évaluation publiée le 04 décembre 2024
Téléchargez l'Avis au ministre sur Carvykti (myélome multiple)
Le myélome multiple (MM) est un cancer relativement fréquent qui prend forme dans la moelle osseuse, et dont la guérison est rare. Il s’agit d’une maladie qui touche particulièrement les personnes de 65 ans ou plus, et davantage les hommes que les femmes. L’espérance de vie des patients atteints d’un MM est variable mais diminue à chaque réapparition. Les patients atteints de MM peuvent éprouver plusieurs symptômes comme la douleur et la fatigue qui nuisent à leur qualité de vie. Actuellement, des associations de médicaments contenant de la lénalidomide sont utilisées comme 1er traitement. Mais lorsque le cancer progresse, les patients peuvent recevoir diverses combinaisons de médicaments qui incluent notamment le daratumumab (DarzalexMC), l’isatuximab (SarclisaMC), le bortézomib, le carfilzomib (KyprolisMC), la dexaméthasone, la cyclophosphamide et la pomalidomide. Ces traitements se donnent par voie sous-cutanée, intraveineuse ou orale selon le traitement. L’important est que la combinaison de médicaments choisie soit différente de celle que le patient a reçue précédemment. Malgré les traitements offerts, lorsque la maladie réapparaît, les options de traitements efficaces et remboursées deviennent de plus en plus rares. À partir de la 3e réapparition de la maladie, certains patients peuvent donc se faire offrir des traitements dans le cadre de protocoles de recherche clinique, ou des traitements qui améliorent le confort et la qualité de vie sans pour autant traiter spécifiquement la maladie.
Le ciltacabtagène autoleucel (cilta-cel [CarvyktiMC]) est une immunothérapie de type CAR-T. L’immunothérapie consiste en la reconnaissance et la destruction des cellules cancéreuses par les cellules immunitaires. Les thérapies CAR-T ont plusieurs particularités, notamment en ce qui a trait à leur fabrication. En effet, il faut d’abord prélever les globules blancs du sang du patient, qui sont ensuite acheminés dans un laboratoire spécialisé qui les modifiera génétiquement afin qu’ils puissent cibler et attaquer les cellules cancéreuses. Le cilta-cel est administré en 1 injection intraveineuse unique. Le cilta-cel est utilisé pour traiter les personnes atteintes d’un MM récidivant et réfractaire, c’est-à-dire celles dont le cancer a progressé à la suite d’un traitement ou qui ne répondent pas à celui-ci, et ayant reçu des médicaments dans la famille des inhibiteurs du protéasome et des agents immunomodulateurs.
L’évaluation de l’efficacité et des effets secondaires du cilta-cel repose sur une étude de bonne qualité. Les résultats de cette étude démontrent que le cilta-cel retarde la progression de la maladie et augmente l’espérance de vie des patients comparativement aux associations pomalidomide/bortézomib/dexaméthasone et daratumumab/pomalidomide/dexaméthasone, traitements qui ne sont pas utilisés au Québec pour le MM. Une étude comparant indirectement le cilta-cel à certaines associations utilisées au Québec à ce stade de la maladie montre que celui-ci est plus efficace pour retarder la progression de la maladie et améliorer la survie des patients.
Le cilta‑cel est associé avec des effets secondaires importants, mais de durée limitée. De plus, cette thérapie peut induire des effets secondaires graves tels que le syndrome de relargage des cytokines, qui entraîne une réaction inflammatoire de grande ampleur dans tout le corps. Ces événements peuvent toutefois être adéquatement pris en charge par du personnel formé. Ces effets secondaires s’apparentent pour la plupart à ceux des autres thérapies CAR-T présentement remboursées au Québec pour d’autres maladies.
Le coût de traitement au cilta-cel est trop élevé. Il est supérieur à celui des associations utilisées au Québec à ce stade de la maladie, à l’exception de l’association isatuximab/carfilzomib/dexaméthasone (IsaKd). De plus, ce coût additionnel ne peut être justifié par les bienfaits cliniques qu’il procure (c.-à-d. ses effets bénéfiques sur la durée et la qualité de vie des patients). De fait, le rapport entre son coût et son efficacité, supérieur par rapport aux associations de traitements utilisées, n’est pas favorable. Le coût de traitement au cilta-cel est cependant inférieur à celui de l’association de traitement IsaKd, et ce, pour des bénéfices de santé jugés similaires. De plus, l’INESSS estime que durant les 3 premières années, l’inscription de cette nouvelle indication au cilta-cel entraînerait des dépenses additionnelles d’environ 146 millions de dollars sur le budget des établissements de santé pour le traitement de 308 patients.
Par ailleurs, en raison des modalités d’administration du traitement et du suivi de ses effets secondaires s’étendant sur plusieurs jours, le patient doit demeurer à proximité du centre désigné, où ces traitements sont administrés, pendant approximativement 1 mois. Cette exigence peut avoir un impact sur la qualité de vie du patient et de ses proches. L’INESSS juge important que toute l’information existante sur les bénéfices cliniques, les incertitudes et les risques relatifs aux immunothérapies CAR‑T soit divulguée aux patients afin qu’ils puissent faire un choix libre et éclairé. Finalement, les ressources organisationnelles ainsi que l’expertise nécessaire à l’administration de ce type de thérapie peuvent être insuffisantes pour offrir le cilta-cel à tous les patients pouvant être admissibles au traitement.
L’INESSS est conscient qu’il est important, pour les patients et leurs proches, d’avoir accès à différentes options de traitement pouvant augmenter leur espérance de vie et maintenir une bonne qualité de vie. Dans un contexte de ressources limitées, il doit formuler des recommandations pour que ces ressources soient investies de façon responsable dans l’ensemble du système de santé. Dans ce contexte, puisque le coût de CarvyktiMC est très élevé par rapport aux bénéfices démontrés, qu’il est associé avec des contraintes organisationnelles importantes et qu’il engendre des coûts conséquents sur le budget des établissements de santé, l’INESSS recommande au ministre de ne pas rembourser CarvyktiMC pour le traitement du MM.